J'ai mal à mon corps...
Scène ordinaire dans une cabine d’essayage
Image extraite du film Little Miss Shunshine ! |
1 : Tiens commence par ça.
2 : Oui c’est pas mal, mais je n’aime pas la couleur.
1 : Ok, alors on peut essayer ça aussi... Tu fais quoi à
te regarder le visage?
2 : Rien…J’ai des boutons. C’est moche
1 : Mais non ce n’est rien là, avec la pollution et ton corps qui change, c’est
normal ne t’en fais pas.
2 : Oui toi aussi tu as des boutons…
1 : Voilà moi j’ai des boutons et je m’en fous. Alors
ce vêtement?
2 : Oui il est bien.
1 : Mais tu l’as à peine vu, prends le temps de
choisir, on n’est pas pressées.
2 : Non mais c’est bon, il est bien.
1 : Tu es sûre?
2 : Oui… et puis de toute façon je ne préfère pas trop
me regarder.
1 : Pourquoi? Tu es toute jolie dans cet ensemble.
2 : Non je ne suis pas jolie…
1 : Ah si tu es même magnifique!
2 : Mais non, regarde on dirait que j’ai de la
moustache, ma lèvre est déformée par cette cicatrice et j’ai des cheveux sur le
front… Et regarde l’intérieur de mon bras, j’ai du poil…
1 : Qu’est-ce que c’est que ces histoires, arrêtes-ça
tout de suite, tu es magnifique!
2 : Tu dis ça juste parce que tu es ma mère…
Voilà le genre de conversation que j’ai de plus en plus
souvent avec elle dans les boutiques. Ça ne nous arrive pas souvent, mais
j’avoue que ces sorties étaient des moments de plaisir. Sauf depuis quelques
années c’est beaucoup moins drôle.
Son innocence est perdue de ce point de vue là… « Mes
cuisses sont trop grosses, mon ventre est trop gros, je suis moche, je ne suis
pas jolie… » J’en entends des vertes et des pas mûres.
Je sais que je ne suis pas la mère parfaite sur ce point-là.
Lorsque je lui réponds en lui disant qu’elle est jolie, voir magnifique, c’est
comme si je voulais nier très fort son mal-être (qui pour moi ne devrait pas
exister si tôt…).
Et puis il m’arrive moi aussi de me critiquer dans le
miroir…mais depuis 2 ans j’évite simplement de le faire quand elle est dans les
parages.
Tout parent désir secrètement que leurs enfants fassent
mieux qu’eux.
Moi, je voulais qu’elle ne s’occupe même pas de son apparence
physique. Je voulais que pour elle, ce soit quelque chose d’invisible. Mais je
le sais maintenant, ce ne sera pas le cas. La société n’est pas là pour aider
cela, l’école, les activités para-scolaires, etc... Rien n’aide et tout te
renvoie à la comparaison, la compétition, etc.
Lorsque je vois des copines se dénigrer, ça me rends
folle…Mais dans mon coin je ne suis pas non plus la meilleure des exemples.
Tout a commencé …
Lorsque j’ai entendu ma fille de 4 ans revenir de l’école en
me disant qu’elle a de grosses cuisses, je suis restée sans voix. Qui avait
bien pu oser lui dire ça? Les autres enfants, tout simplement… À partir de
quand, perd-t-on cette innocence vis à vis de l’autre? À quelle âge devient-on
juge des autres et de nous-même? Trop tôt, c’est ce qui m’effraie.
Alors, pour parer à cela, on consulte de temps en temps pour l'aider dans son estime de soi, on
essaye de lui faire prendre conscience de ses valeurs, lui faire prendre
conscience que son physique ne fait pas tout. Mais une chose est
évidente : quand on est soi-même instable, cela demande de mettre les
bouchées doubles.
Élever des enfants tout en essayant de se détacher de
certaines mauvaises habitudes familiales est très compliqué.
Élever et vivre avec des hypersensibles est très demandant…
Élever des humains de manière générale est très compliqué …
Nous sommes des milliards sur Terre avec nos sensibilités, nos humeurs. Et nous
sommes des milliards à tenter de cohabiter ensemble, mais on s’emmerde toujours
avec des questions qui ne devraient pas être prioritaires…
J’aime à penser que nos corps étaient là bien avant notre
conscience. Alors pourquoi plus tard, dans nos vies, on pense pour les autres
et non pour nous-même!
En attendant, je fais ce que je sais faire de mieux: être là, pour elle, pour eux.
Quelques articles qui peuvent interpellés, faire réfléchir :
Un texte d’une collaboratrice pour le géniallissime blogue Dix
octobre
La grossophobie à l’école discutée sur le blogue Ma
famille mon Chaos
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