Okinum au Centre du Théâtre d'Aujourd'hui
Quand tout commence avec des castors
En 1976, j’entrais à l’école primaire Simon Bolivar dans le
19ème arrondissement de Paris. À deux pas des Buttes-Chaumont, construit
en pierre de taille dans le style Second Empire, l’établissement m’inspirait le
respect, de par sa façade partiellement brune et austère. À la fin de ma
première année, je reçu un prix destiné à m’encourager dans l’apprentissage des
fondamentaux. Le livre, édité par l’École des loisirs en 1969, s’intitulait Les Castors, et faisait partie de
la collection Animaux en famille. C’était un ouvrage illustré, qui expliquait
comment ces animaux vivaient, comment ils construisaient leur habitat, en
prenait soin et élevaient leurs petits. Il montrait et expliquait également les
interactions de ces animaux intelligents, s’il en est, avec leur environnement
et la manière qu’ils ont de le préserver. Ce livre, que je n’ai jamais cessé
d’aimer, m’a fasciné pendant longtemps. Il me fascine encore. Il fait malheureusement partie d'affaires qui m’ont été dérobées, il y a de cela
quelques années…
Okinum
Crédit photo: Valérie Remise |
La semaine dernière à Montréal j’ai assisté à Okinum, une
création des productions ONISHKA. Émilie Monnet, artiste multidisciplinaire,
s’est inspirée d’un rêve récurent qu’elle a fait à trois reprises; dans lequel
un castor géant apparaît. L’artiste, autrice[1]
et performeuse, nous offre ici une œuvre qui ne peut laisser personne indifférent.
La pièce en langue Anishnabemowin, mais aussi en français et
en anglais, est structurée autour de trois médiums : le théâtre, la
performance et les arts médiatiques. Les interactions entre ces trois
techniques, ainsi que la présence et le jeu d’Émilie Monnet participent à créer
une atmosphère mystérieuse et hypnotisante.
Crédit photo: Valérie Remise |
Les sons enregistrés, qui ont été travaillés à l’aide d’une
table de mixage, ainsi que les images projetées sur des écrans, tout autour de
la salle, participent à délivrer le message de l’artiste.
Cette dernière, de
mère anishnaabe et de père français nous interpelle au travers de
problématiques telles que l’identité, la mémoire, l’Histoire et les mutations
de nos sociétés. Elle arrive à intégrer plusieurs problématiques telles que la
place des femmes dans les sociétés humaines, la spoliation et la maltraitance
des peuples autochtones, ainsi que la maltraitance des écosystèmes de notre
planète. À différents moments de la représentation, le castor devient à la fois
le symbole de la lutte pour la survie de notre planète et des espèces qui y
vivent, mais également le symbole des luttes des individus et des populations
qui se trouvent confrontées à l’injustice et à la sauvagerie humaine. Le castor
géant dont elle nous parle se dresse tel un barrage entre nos comportements
destructeurs et ceux qui en sont victimes. Il nous rappelle notre humanité.
Émilie Monnet, de par sa présence et sa vision, provoque chez
nous plusieurs réflexions. Son message intemporel a la force de l’universalité.
L’universalité qui est le propre des grandes œuvres d’art.
Du 2 au 20 octobre 2018 dans la salle Jean-Claude-Germain, du
Centre du Théâtre d’Aujourd’hui
Texte et mise en scène Émilie Monnet
Collaborations à la mise en scène Emma Tibaldo, Sarah
Williams
Interprétation Émilie Monnet, Jackie Gallant
Crédit photo: Valérie Remise |
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